Une synergie gagnante pour les entreprises de demain : inclure les collaborateurs dans l’amélioration du fonctionnement de l’entreprise et de l’expérience client. Avec Claire Bonniol, co-fondatrice et directrice générale de CXB HUB.

Une synergie gagnante pour les entreprises de demain : inclure les collaborateurs dans l’amélioration du fonctionnement de l’entreprise et de l’expérience client.  Avec Claire Bonniol, co-fondatrice et directrice générale de CXB HUB.

Au début de sa vie professionnelle, Claire Bonniol a travaillé pour le Fond Social Européen sur des sujets d’innovation sociale, d’innovation ressources humaines et formation. Animée par une vision multiculturelle et internationale, Claire Bonniol continue son chemin avec le Groupe Accor pendant 10 ans, groupe au sein duquel ses missions de management, formation employé et service client la confortent dans ses convictions : une bonne gestion de l’expérience employé est un atout formidable pour assurer une bonne expérience client. Claire est aujourd’hui Co-Fondatrice et Directrice Générale de CXB HUB, une entreprise implantée au Royaume-Uni et en France, spécialiste des expériences clients et collaborateurs réussies. Nous la rencontrons aujourd’hui pour qu’elle nous parle de l’importance pour les entreprises d’améliorer leur expérience collaborateurs, à l’heure où la rétention des employés est en train de devenir un véritable challenge pour les employeurs.

Est-ce que vous pouvez définir ce qu’est l’engagement employé ? Pourquoi c’est important aujourd’hui ? 

En ce moment c’est un sujet qui est à la mode, mais ce n’est pas un sujet nouveau. Depuis toujours, si on a un collaborateur, on a besoin qu’il soit engagé dans ce qu’il fait. L’engagement est important parce qu’il traduit un degré de motivation, d’implication, de satisfaction, de bien être, que ce soit par rapport à l’emploi que le collaborateur exerce, ou bien par rapport à l’entreprise. 

Il y a plusieurs chiffres de l’étude Forrester 2020 qui permettent de comprendre la force de l’engagement employé : 

  • Une entreprise qui a un taux d'expérience employé élevé va avoir deux fois plus de chance de faire une croissance annuelle de plus de 10%. 
  • Les entreprises qui ont un score d’expérience employé élevé sont 24 fois plus enclines à délivrer une bonne expérience client. 
  • Quand on a un score d’expérience employé élevé, on a 9 fois plus de chances que les employés recommandent l’entreprise dans laquelle ils travaillent. 

On arrive donc à mesurer aujourd'hui qu’une expérience employé positive a un impact sur la qualité de l’expérience client. 

Ces chiffres montrent l’impact de l’expérience employé en termes de productivité, de créativité, de profitabilité et de valeur de l’entreprise. On sait qu'une des raisons pour lesquelles les employés sont fidèles à leur entreprise, c’est lorsqu'il y a une bonne ambiance avec les collègues, et/ou lorsqu’il y a une bonne relation avec le manager. Et bien souvent, on quitte une entreprise quand on a une mauvaise relation avec son manager. Du point de vue de la qualité de service, si on vit un climat difficile dans son entreprise, il est extrêmement difficile de se montrer très proactif, très sympathique avec le client, parce qu'on est en souffrance, tout simplement. Donc oui, il y a des impacts, et les chiffres de retour sur investissement permettent de rassurer et d’encourager à l’action. 

Depuis le début de la pandémie, avez-vous observé un changement d’attitude des entreprises par rapport à ces sujets ? Est-ce devenu une préoccupation plus importante pour les entreprises ? 

C’est vrai que c’est une préoccupation forte, et dans le monde du management de l’expérience, c’est le sujet phare 2022. C’est devenu très important car les entreprises n’ont pas assez investi dans l’expérience employé jusqu’à présent. Pour bon nombre d’entre elles, c’est seulement depuis la pandémie qu’elles commencent à écrire des parcours employés, à écouter de façon structurée ce que les employés ont à dire. Cela se traduit par des enquêtes, des groupes de travail, l’analyse fine des verbatims pour vraiment comprendre ce qui se dit. Parce que si on n’écoute pas les employés, on ne peut pas prendre les bonnes mesures pour leur bien-être.

Avec la pandémie, on a perdu une partie du contact social. C’est maintenant toute une rééducation à faire pour bien vivre en entreprise. Au contact des collègues, on peut lire sur les visages quand quelqu’un commence à être en colère, voir que quand on s’est exprimé, on n’a pas été compris, ou plus positivement se faire en quelque sorte irradier par le sourire de la personne qui est en face, et se construire grâce à ça. Si on est à distance ou qu’on a le masque en permanence, ces repères se perdent.

Qu’est ce qui se passe quand les entreprises viennent vous voir ? Quelles sont leurs problématiques ? 

Ces entreprises de toutes tailles et de tous secteurs ont des problématiques de turnover d’employés, de satisfaction au travail, comment on peut faire pour garder les employés et qu’ils soient plus investis. Il y a des sujets aussi d’acquisition des compétences, c'est-à-dire accélérer la montée en expertise, faire en sorte que quelqu’un qui arrive soit plus rapidement bon dans ce qu’il fait. Il y a aussi des sujets managériaux, comme rénover le style de management pour qu’il soit en soutien de la culture client de l’entreprise. Nous faisons beaucoup d’accompagnement autour de ces sujets. Par exemple, nous faisons écrire aux managers les parcours des employés, ce qui amène évidemment à une prise de conscience très forte. Il faut que quelqu’un qui arrive dans une entreprise puisse très facilement et très rapidement comprendre ce qui est attendu. On va décrire les 20% des situations qui vont aider à régler 80% des cas en fait, et après c’est l’intelligence humaine qui fait le reste.

Pouvez-vous nous donner des exemples concrets de plan d’action que vous avez mené avec des entreprises ?

Il y a deux angles pour travailler sur l’expérience employé. D’abord, il faut développer la coopération et donc impliquer les employés à tous les niveaux dans la réussite de l’expérience des clients. Nous allons organiser et animer des ateliers de réflexion et de production, par les employés, de ce que doit être l’expérience des clients. 

Dans cet exemple, cela ne s’appelle pas expérience employé, mais ça en est, parce que c’est profondément pédagogique. D’abord, on donne de l’importance à ce que les employés veulent faire pour les clients, donc on les amène à réfléchir, à se mettre à la place de l’autre avant de faire quoi que ce soit. Tout le monde a envie de bien faire son travail, et de rendre un vrai service à son client. Par exemple, nous avons fait des ateliers dans une grande entreprise d'ingénierie américaine. Grâce au travail que nous avons fait avec eux, ils ont augmenté de 60% en un an la maturité “orientation client de l’entreprise”, ce que nous mesurons avec un outil spécifique, myCXvision. Nous avons travaillé dans les maisons de retraite aussi, où le métier est difficile à exercer, et le fait d’impliquer l’ensemble des salariés pour améliorer l’expérience client, ça aide à développer l’esprit d’innovation et penser au service rendu avec une autre vision que celle du métier de soignant.

Le deuxième angle, c’est la construction de parcours employés, nous l’avons fait d’ailleurs avec les mêmes clients. Nous avons revu par exemple tout le processus d’accueil et intégration des nouveaux employés, pour en faire quelque chose de beaucoup plus mémorable. Nous scénarisation cette expérience sur l’ensemble du parcours du collaborateur. 

Il y a un troisième axe qui est important, c’est que nous formons des coachs qui vont être des référents culture client pour les employés, comme ce que nous avons fait pour une société d’énergie. Avoir une personne de référence pour toujours avoir le bon ton et une bonne qualité de service avec leur client par téléphone et par email procure un cadre et un garde-fou tant pour le conseiller que pour l’entreprise. Ce référent peut aider le conseiller à se préparer à un entretien difficile, ou à réagir à postériori lorsque quelque chose s'est mal passé, et à être mieux armé pour la prochaine fois. En termes de développement personnel, c’est fondamental et ça procure un vrai sentiment de bien-être au travail.

Quels sont les outils que vous conseillez ou que vous utilisez avec vos clients pour établir une stratégie et mesurer l’impact des actions mises en place ?

Nous avons mis en place un outil d’analyse qui s’appelle MyCXVision que nous mettons à disposition de nos clients. Cet outil permet de faire une évaluation croisée de la culture client de son entreprise, et de suivre l’évolution de cette culture dans le temps et en fonction des initiatives que l’outil suggère de mettre en place. 

Pour certains de nos clients, nous créons et construisons des outils sur-mesure. Pour  un grand nom du voyage, nous avons créé une app qui permet aux employés de participer à l’amélioration du parcours client. En premier lieu, un référentiel de service a été construit, qui répond aux questions suivantes : comment se comporter, que faire avec les clients dans telle ou telle situation en fonction du degré d’urgence ou de disruption à l’instant précis… Ces actions sont listées dans l’application, et les employés peuvent proposer des modifications. 

Nous produisons ces outils digitaux, mais nous faisons aussi de l’écriture de chartes et d’une déclinaison opérationnelle de documents stratégiques : le guide, les orientations, les points de repère pour bien délivrer la qualité de service. 

L’expérience client et l’expérience collaborateur sont pour moi deux sujets intrinsèquement liés. Il ne faut pas limiter l’engagement et l’expérience employé à un sujet de bien-être au travail. Pour nous, c’est un peu contre-productif. Cela fait des années que je travaille sur ces sujets, et ce que j’observe systématiquement, c’est qu’en tant que collaborateur, on attend avant tout de rendre service, d’être utile, se sentir utile, et c’est comme ça qu’on se réalise…et peut-être qu’on se sent heureux.