Promouvoir un mode de vie durable : Une discussion avec Georgina Wilson-Powell, experte en écologie
Dans le paysage mondial d'aujourd'hui, le mode de vie durable* est devenu plus qu'un simple mot à la mode - c'est un aspect crucial de la prise de conscience des consommateurs. Avec 81 % des consommateurs exprimant un fort désir de voir les entreprises contribuer positivement à l'amélioration de l'environnement, il existe une attente croissante pour que les entreprises fassent de la durabilité une valeur fondamentale.
Georgina Wilson-Powell incarne cet engagement à travers sa carrière dédiée à rendre la vie durable accessible et impactante. Autrice de 3 livres, dont son dernier ouvrage "365 Façons de sauver la planète", consultante, ambassadrice et experte prisée, Georgina collabore avec diverses marques, organisations caritatives et événements pour promouvoir ce sujet.
Dans cette interview, nous parlons de sa carrière, de l'évolution des tendances en matière de durabilité et elle nous transmet des conseils pratiques tirés de ses livres et de son travail de consultante.
- De globe-trotteuse à défenseure de l'environnement : quel a été le déclic qui vous a poussée à changer de carrière ?
Naviguer entre les îles paradisiaques et rédiger des articles sur les tendances du moment faisait partie de mon quotidien en tant que rédactrice en chef d'un magazine de voyages et de lifestyle à Dubaï. Si ce mode de vie semblait idyllique, il a progressivement éveillé en moi une prise de conscience croissante de mon impact environnemental.
En effet, j'étais une grande consommatrice de bouteilles d'eau en plastique et de repas préparés dans les aéroports, et j'ai pu constater de visu les conséquences de ces pratiques, notamment lors de mes voyages en Asie et en Amérique du Sud, où la pollution plastique et les dégradations environnementales atteignent des niveaux alarmants.
Parallèlement, j'ai eu la chance de rencontrer des individus extraordinaires qui consacraient leur énergie à des projets de conservation et d'action sociale pour lutter contre ces fléaux.
De retour au Royaume-Uni en 2014, je ressentais une urgence à agir. Il m'a fallu quelques années pour cerner la meilleure façon de contribuer, et c'est ainsi que Pebble est né : un magazine dédié à la durabilité, explorant des thématiques telles que la mode, l'alimentation et le voyage dans une perspective éco-responsable.
L'objectif était de mettre en lumière des solutions positives et des changements que les consommateurs peuvent adopter pour réduire leur impact écologique.
- Comment le concept de développement durable a-t-il évolué ces dernières années et quelles sont les principales tendances qui façonnent un mode de vie durable en 2024 ?
Malheureusement, l’épidémie de COVID-19 a perturbé plusieurs tendances importantes qui gagnaient du terrain en 2019. Cela incluait l'abandon des plastiques à usage unique, une sensibilisation croissante à la pollution de l'air et aux impacts sur la santé des microplastiques, ainsi que la croissance des marques d'aliments et de boissons biologiques et durables. Pendant la pandémie, ces tendances se sont initialement développées car les gens commandaient plus de produits à domicile, mais la crise actuelle du coût de la vie a entravé leur croissance continue. Les contraintes financières et de temps ont rendu difficile pour les gens de s'engager et de soutenir les pratiques durables comme ils le faisaient auparavant.
Plus récemment, on observe une augmentation de l'éco-anxiété et de l'éco-épuisement due à l'impossibilité de traiter l'information et son impact, tant celui-ci est accablant et immense.
Une autre tendance importante est la hausse du "greenwashing" (marketing écologique trompeur). Cependant, je pense que de plus en plus de gens le repèrent. Il existe davantage de lois pour l'arrêter et les entreprises se mettent à parler d'objectifs à long terme, d’objectifs basés sur la science et n'essaient plus de faire passer tout comme durable et neutre en carbone.
- Vous avez écrit trois livres sur le développement durable. Pourriez-vous partager des idées clés ou des thèmes de vos livres que vous jugez essentiels pour les personnes souhaitant adopter un mode de vie plus durable ?
Dans mes ateliers et conférences, je me concentre sur des thèmes tels que les données, la mode et l'alimentation car ils sont universels et faciles à comprendre. Ces domaines proposent souvent des solutions qui ne coûtent pas plus cher, ce qui les rend accessibles pour un changement immédiat.
Les données sont un excellent point de départ pour une conversation sur l'empreinte carbone cachée de notre vie numérique. Beaucoup de gens ne réalisent pas que les centres de données, qui alimentent notre mode de vie hyperconnecté, ont une empreinte carbone comparable à celle de petits pays. Par exemple, un email avec une pièce jointe génère environ 50 grammes de CO2, tandis qu'un appel Zoom d'une heure avec la vidéo activée peut en produire environ un kilogramme. Des actions simples comme éteindre sa caméra pendant les appels vidéo, éviter les emails inutiles et opter pour des appels téléphoniques au lieu de FaceTime peuvent faire la différence.
Les gens sont souvent curieux des alternatives pratiques, comme savoir si les lave-vaisselle sont plus écologiques que de laver la vaisselle à la main, ou si les douches sont plus écologiques que les bains. Ces questions soulignent l'importance de faire des choix durables sans avoir besoin d'adopter de nouvelles technologies ou d'investir dans de nouveaux équipements.
L'une de mes principales découvertes est que la plupart des gens veulent vraiment avoir un impact positif sur la planète. Ils ne veulent pas que leurs enfants vivent dans un monde inhospitalier. Cependant, ils ont besoin d'informations justes, transmises de manière non moralisatrice et sensible, en tenant compte notamment de l'impact financier. Il faut également de l'équité ; les gens veulent voir les marques et les gouvernements prendre des mesures et donner l'exemple. La responsabilité ne peut pas reposer uniquement sur les consommateurs. Si cela semble injuste, les gens sont plus susceptibles de se désengager des efforts de développement durable.
- En tant que consultante, vous avez travaillé avec un large éventail d'organisations. Quelles sont les idées fausses courantes que vous rencontrez en collaborant avec elles et comment aidez vous vos clients à garantir que leurs efforts de développement durable soient authentiques et efficaces ?
Je pense que beaucoup d'entreprises recherchent une solution miracle et sous-estiment l'importance d'une communication cohérente. Je dis toujours à mes clients qu'en l'absence d'une communication claire, les consommateurs supposent souvent le pire. Si vous ne leur parlez pas de vos pratiques durables, ils penseront que vous ne faites rien. Les consommateurs d'aujourd'hui sont bien informés et veulent des détails, pas seulement des déclarations générales comme "nous atteindrons la neutralité carbone d'ici 2040". Ils veulent comprendre comment vous comptez atteindre ces objectifs et ont souvent plus de connaissances sur le développement durable que les marques ne le pensent.
Il ne suffit pas de publier un rapport d'impact annuel ou de diffuser des statistiques autour de la Journée de la Terre. Le développement durable doit être intégré dans chaque campagne, message marketing et effort de communication.
Je parle également beaucoup de l'importance du concept de storytelling ou communication narrative : Comment ne pas l'oublier ? Et comment construire la fidélité de vos consommateurs à votre marque autour de ça ?
Cela ne se fera pas du jour au lendemain, mais dans un monde où la fidélité à la marque semble très volatile, cela devrait aider les consommateurs à vous rester fidèles à long terme.
- Comment imaginez-vous l'avenir du mode de vie durable et quelles mesures pensez-vous que les individus, les entreprises et la société dans son ensemble doivent prendre pour en faire une réalité ?
Pour atteindre la neutralité carbone, nous avons besoin de changements sociétaux massifs et de modifications systémiques. Nous devons également nous assurer que tout le monde est inclus dans cette transition. Il ne suffit pas de se concentrer uniquement sur les classes moyennes ou ceux qui peuvent se permettre des véhicules électriques ; nous devons embarquer tout le monde. De plus, nous devons devenir plus autonomes et nous reconnecter avec la nature. Cela comprend l'éducation à la cueillette, à la culture de notre propre nourriture et à la compréhension du monde naturel qui nous entoure.
Notre dépendance aux chaînes d'approvisionnement alimentaires mondiales et aux ressources externes doit être équilibrée par le développement de compétences telles que le tricot, la culture de nourriture et d'autres pratiques d'autosuffisance.
Le rythme du changement doit s'accélérer et nous avons besoin d'une réflexion audacieuse sur la définition d'une société à zéro émission nette, garantissant un accès équitable pour tous à l'eau potable, à une éducation de qualité, aux soins de santé et aux autres produits essentiels.
Les efforts de développement durable se font souvent en vase clos, séparés des questions sociales, mais ils devraient y être intégrés. Par exemple, Paris intègre des solutions basées sur la nature dans les fonctions de la ville, et Amsterdam est en passe de devenir la première ville zéro déchet. Les changements à l'échelle des villes sont particulièrement intéressants car ils sont souvent à l'avant-garde de systèmes et d'approches innovants.
*Le mode de vie durable fait référence à un ensemble de choix et de comportements adoptés par un individu ou une communauté visant à minimiser l'impact négatif sur l'environnement, tout en favorisant le bien-être social et économique à long terme. Cela inclut généralement la réduction de la consommation des ressources naturelles, la limitation des déchets produits, l'utilisation de sources d'énergie renouvelables, le soutien aux produits locaux et durables, ainsi que la promotion d'une économie circulaire et équitable.