Briser le silence : Comment Beth French de "Let's Talk About Loss" aide les jeunes à faire face au deuil

Briser le silence : Comment Beth French de

La perte d'un être cher est une expérience universelle, mais le chemin du deuil peut sembler particulièrement solitaire, surtout pour les jeunes adultes. Selon une étude de 2022*, 77 % des 18-35 ans ont vécu un deuil, ce qui souligne l'impact considérable du deuil sur une génération qui vit des étapes de vie cruciales comme les études, la carrière et les relations. C'est dans ce contexte que Let's Talk About Loss est né, se voulant comme un réseau de soutien essentiel.

Fondée par Beth French, l’association propose un espace de compassion et de compréhension où les jeunes peuvent faire face à leur deuil. Ayant elle-même vécu la perte d’un parent à l’âge de 20 ans, Beth a identifié le besoin urgent d’une communauté où les jeunes puissent parler ouvertement de la perte d'un proche sans jugement. Let’s Talk About Loss est né de cette expérience personnelle, avec pour objectif de créer un environnement bienveillant, où le deuil n’est pas un sujet tabou. Dans cet entretien avec sa fondatrice, nous évoquons le travail de l’association et son impact sur la vie des jeunes au Royaume-Uni.

 

  • Qu'est-ce qui vous a incité à lancer Let's Talk About Loss et en quoi votre expérience personnelle a-t-elle façonné la mission et l'approche de l'association ?

Let's Talk About Loss est né de la profonde douleur que j'ai ressentie après la perte de ma mère, Susan, en 2015. Le chemin vers la création d'une association était inattendu. Au départ, j'ai trouvé du réconfort en écrivant sur mes expériences dans un blog. En partageant mes sentiments, j'ai réalisé que je n'étais pas seule.
Des gens m'ont contactée, et bientôt, nous nous sommes réunis en personne pour nous soutenir mutuellement.
Cette expérience partagée est au cœur de notre association. Nous rassemblons des jeunes endeuillés pour créer un espace bienveillant, où ils peuvent parler ouvertement, trouver du soutien et réaliser qu'ils ne sont pas seuls.
Je connais par expérience personnelle le pouvoir transformateur de la connexion pendant le deuil. Cela m'a énormément aidée, et je suis déterminée à offrir le même soutien aux autres.

 

  • Pouvez-vous expliquer l'importance de la tranche d'âge 18-35 en ce qui concerne vos services de soutien ? Pourquoi pensez-vous que ce groupe est souvent négligé dans le soutien pendant un deuil ?

Un aspect crucial de Let's Talk About Loss était de créer un espace sécurisé et bienveillant. Nous avons atteint cet objectif en fixant une limite d'âge de 18 à 35 ans, une tranche démographique souvent négligée dans le soutien à la perte d'un être cher. Personnellement, ayant perdu ma mère à 20 ans, je me suis retrouvée dans un vide entre les services de deuil pour enfants et adultes. Cette expérience a mis en évidence un réel besoin de soutien adapté aux jeunes adultes. 

Entre 18 et 35 ans, la vie est pleine de changements importants. Vous pouvez quitter le domicile familial pour la première fois. Vous pouvez déménager dans une autre ville. Vous pouvez commencer l'université ou un nouvel emploi. Vous pouvez rencontrer un partenaire. C'est une période de grandes transitions et de nouvelles expériences. 

Vivre un deuil pendant cette période est particulièrement difficile. L'association offre un espace dédié aux jeunes pour partager leurs expériences. Nous travaillons également en étroite collaboration avec d'autres organisations pour offrir un soutien complet. Bien que beaucoup nous trouvent grâce aux réseaux sociaux, le bouche-à-oreille et les recommandations d'autres associations jouent un rôle essentiel pour atteindre ceux qui ont besoin de nous.

 

  • Comment abordez-vous le tabou entourant la mort et le deuil, particulièrement chez les jeunes ?

Bien qu'il y ait eu des progrès depuis la création de Let's Talk About Loss en 2015, le sujet reste sensible. Les conversations sur la santé mentale se sont ouvertes, mais le deuil reste souvent un tabou. Cela est particulièrement vrai dans certaines cultures où parler de deuil est considéré comme inapproprié - on vous encourage plutôt à garder cela pour vous et à ne pas en parler aux autres. 

Nos rencontres sont conçues pour être des espaces bienveillants où les gens peuvent parler ouvertement de leur deuil. Nous créons un environnement où il est acceptable de rire, de pleurer ou simplement d'écouter. En normalisant le deuil, nous espérons aider les gens à se sentir moins isolés. Beaucoup de personnes ont du mal à parler de leur deuil à leur famille, à leurs amis ou à leurs collègues, donc avoir un espace dédié à ces conversations est essentiel.

 

  • Quelle formation vos hôtes reçoivent-ils pour garantir qu'ils peuvent offrir un environnement sûr et solidaire aux participants ?

Nos rencontres sont animées par des hôtes bénévoles qui sont aussi des jeunes personnes ayant vécu un deuil. Bien qu'ils apportent leur expérience personnelle inestimable, nous leur fournissons une formation approfondie afin qu'ils soient en mesure de soutenir les autres. 

La protection de l'enfance est une priorité, c'est pourquoi nos bénévoles apprennent à reconnaître les problèmes potentiels et à y répondre de manière appropriée.

Il est également crucial que nos hôtes prennent soin de leur propre bien-être tout en soutenant les autres. Nous proposons des formations sur comment fixer des limites et gérer son propre deuil.
L'inclusion et l'accessibilité sont fondamentales dans notre approche. Nous voulons créer des espaces bienveillants et accueillants pour tous les jeunes endeuillés. Pour améliorer encore notre soutien, nous collaborons avec des organisations spécialisées dans des types de deuil spécifiques, tels que le deuil lié au suicide ou le deuil masculin. Cela nous permet de fournir à nos bénévoles les connaissances et les outils nécessaires pour soutenir les personnes confrontées à différentes situations.

 

  • Quels sont les principaux malentendus sur le deuil vous espérez dissiper grâce à l'association ?

L’un des plus grands malentendus sur le deuil est que les gens ne veulent pas parler de la personne qu’ils ont perdue.
J’adore parler de ma mère, et je sais que beaucoup d’autres ressentent la même chose. C’est une façon de garder nos proches vivants dans nos cœurs.
Les gens évitent souvent de parler du défunt par crainte de causer de la peine. Bien que le deuil puisse être douloureux, il est important de se rappeler que parler de la personne décédée est une façon d’honorer sa mémoire. En encourageant des conversations ouvertes, nous pouvons aider les gens à se sentir soutenus et moins isolés dans leur deuil.

 

  • Quels défis avez-vous rencontrés dans le développement de votre initiative et comment pouvons-nous vous soutenir ?

    En tant que petite association, notre plus grand défi est de concilier nos ambitions avec nos ressources.
    Nous avons la chance de disposer d’une équipe incroyable de jeunes bénévoles, débordants d’enthousiasme et d’idées. Cependant, le manque de financement limite notre capacité à réaliser pleinement leur potentiel. Une augmentation du financement nous permettrait d’élargir notre portée et notre impact. Les collaborations avec d’autres organisations seraient également précieuses, car elles peuvent ouvrir de nouvelles portes et opportunités. Il existe de nombreuses façons de soutenir notre travail. Les dons financiers, l’achat de nos cartes de deuil ou de notre livre, ou la participation à un événement sportif sont autant de contributions appréciées.
    Ou tout simplement de nous suivre en ligne et de partager notre message peut faire une grande différence. Chaque contribution, aussi petite soit-elle, nous rapproche de notre objectif de veiller à ce qu’aucun jeune ne fasse son deuil seul.

     

    • Quels sont les futurs projets de Let's Talk About Loss ?

      Notre vision est d’assurer qu’aucun jeune ne fasse son deuil seul, et nous nous engageons à élargir notre soutien.
      Nous prévoyons d’augmenter le nombre de rencontres à travers le Royaume-Uni et d’explorer différentes façons d’accompagner ceux qui préfèrent d’autres formes de soutien.
      Nous reconnaissons que le deuil touche chacun différemment, et nous nous intéressons particulièrement aux défis spécifiques rencontrés par les jeunes hommes, qui ont souvent plus de difficultés à exprimer leurs émotions ou à participer à des groupes de soutien.
      Nous continuerons à créer des espaces inclusifs où chacun se sent à l’aise pour partager son expérience.


      *Sondage 2022 de Let’s Talk About Loss ​​https://letstalkaboutloss.org/2022/01/15/research-reveals-77-of-18-35-year-olds-are-bereaved/